Sécurité, Terrorisme

Attentat “déjoué” de Villejuif : retour sur les 7 infos de la semaine

3millions7 fait le point sur les informations recueillies depuis l'interpellation du principal suspect, Sid Ahmed Ghlam, dimanche.

Mer­cre­di 22 avril, on appre­nait qu’un atten­tat con­tre une ou deux églis­es de Ville­juif (Val-de-Marne) avait été déjoué par hasard trois jours plus tôt. Cette his­toire en recoupe une autre, celle du meurtre d’Au­rélie Châte­lain, retrou­vée criblée de balles dans sa voiture incendiée, dimanche. Sept points pour bien com­pren­dre ces deux affaires :

Un arsenal découvert par hasard

A 8h50, dimanche 19 avril, Sid Ahmed Ghlam appelle les urgences à cause d’une blessure par balle à la jambe. Con­tac­tée par le SAMU, la police décou­vre un véri­ta­ble arse­nal de guerre dans sa voiture : des armes, un gilet pare-balles, des télé­phones porta­bles mais aus­si des doc­u­ments sur des cibles d’at­ten­tat poten­tielles. Et réalise que cette blessure est vraisem­blable­ment due à une mau­vaise manip­u­la­tion de la part du jeune homme.

Dans la foulée, une perqui­si­tion est menée à son domi­cile, une cham­bre uni­ver­si­taire dans le XII­Ie arrondisse­ment de Paris. La police y décou­vre trois fusils d’as­saut, un chargeur et des car­touch­ières vides, des bras­sards de police, ain­si que des doc­u­ments qui indiquent la pré­pa­ra­tion d’un atten­tat con­tre une ou deux églis­es. Cer­tains men­tion­nent explicite­ment le groupe Etat islamique ou Al-Qaida.

L’homme était connu des services de renseignement

Des recherch­es sur son iden­tité révè­lent que le sus­pect, un Algérien de 24 ans, était con­nu par les ser­vices de ren­seigne­ment. Etu­di­ant en infor­ma­tique, il avait notam­ment fait part sur Face­book de son envie de par­tir en Syrie.

En févri­er, après avoir dis­paru une dizaine de jours en Turquie, où passe la majorité des can­di­dats au jihad, il est enten­du par la DGSE à deux repris­es. Mais à l’époque, celle-ci ne trou­ve pas « d’élé­ments sus­cep­ti­bles de jus­ti­fi­er l’ou­ver­ture d’une enquête judi­ci­aire », selon le min­istre de l’In­térieur, Bernard Cazeneuve.

Une partie de son entourage vit dans l’islam radical

Dès lun­di, des perqui­si­tions ont été menées à Saint-Dizier (Haute-Marne), où rési­dent les par­ents du sus­pect. Une jeune femme de 25 ans y est inter­pel­lée deux jours plus tard. Celle qui serait la petite amie, ou l’ex-com­pagne de Sid Ahmed Ghlam, vit dans un pavil­lon aux volets tou­jours fer­més depuis six ou sept mois, en com­pag­nie de ses deux jeunes enfants. Vraisem­blable­ment con­ver­tie à l’is­lam et tou­jours vêtue d’une burqa, elle est décrite par ses voisins comme « extrême­ment discrète ».

Chez elle, les policiers ont décou­vert des clefs de chiffre­ment, sous forme de codes sur de nom­breux bouts de papi­er, qui lui per­me­t­taient d’en­reg­istr­er des numéros sur son télé­phone portable ou d’en­voy­er des tex­tos illis­i­bles en cas de sur­veil­lance poli­cière. Un procédé qui aurait notam­ment servi pour la cor­re­spon­dance abon­dante qu’elle entrete­nait avec Sid Ahmed Ghlam.

Un suspect à priori dirigé à distance

Les enquê­teurs décrivent comme “étrange” l’at­ti­tude de Sid Ahmed Ghlam. On le croirait « mû par une force l’oblig­eant à ne rien dire » mal­gré des éclairs où l’on devine une « volon­té de par­ler », racon­te une source proche du dossier. Sid Ahmed Ghlam est tou­jours en garde-à-vue à l’Hô­tel Dieu, où il devrait rester jusqu’à same­di. S’il reste « peu dis­ert », les policiers décou­vrent peu à peu un pro­fil hors normes. Pour « la pre­mière fois », un pro­jet d’at­ten­tat sem­ble avoir été « télé­com­mandé à dis­tance » par « un ou de mys­térieux » hommes, vraisem­blable­ment étab­lis en Syrie.

Les enquê­teurs évo­quent le « com­porte­ment sec­taire” du jeune Algérien, qui « sem­blait lit­térale­ment sous la coupe » de ses mys­térieux com­man­di­taires. Ceux-ci lui auraient « claire­ment » ordon­né de frap­per spé­ci­fique­ment des églis­es. Sid Ahmed Ghlam a aus­si été aigu­il­lé sur un ou des com­plices à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). C’est là qu’il aurait été récupér­er sa panoplie de com­man­do, dans le cof­fre d’une voiture garée. La voiture est actuelle­ment passée au peigne fin afin de retrou­ver ces éventuels complices.

Le flou demeure sur la mort d’Aurélie Chatelain

Cette con­seil­lère munic­i­pale de Caudry (Nord) a été retrou­vée morte dans sa voiture en feu, à Ville­juif, dimanche à l’aube. Les pom­piers ont trou­vé son corps criblé de balles tan­dis qu’ils s’apprêtaient à inter­venir sur un sim­ple incendie de voiture, à deux kilo­mètres d’une des églis­es poten­tielle­ment visées par Sid Ahmed Ghlam.

Le pro­cureur de la République de Paris, François Molins, a con­fir­mé la présence de ce dernier à Ville­juif « dans le créneau horaire où Aurélie Châte­lain a été assas­s­inée ». Des traces de son ADN ont été retrou­vées sur le frein à main et le bas de caisse de la Renault Scénic de la jeune femme. Sur le man­teau du sus­pect, du sang appar­tenant à la vic­time a aus­si pu être isolé. Si les cir­con­stances du drame demeurent incon­nues, Sid Ahmed Ghlam a été mis en exa­m­en pour assas­si­nat en rela­tion avec une entre­prise ter­ror­iste. Une marche blanche aura lieu same­di à Ville­juif en hom­mage à la victime.

Le plan Vigipirate renforcé pour les églises

Après avoir ren­con­tré l’archevêque de Paris, Mgr André Vingt-Trois, Bernard Cazeneuve a affir­mé sa volon­té de « garan­tir un dis­posi­tif qui cor­re­sponde aux attentes des représen­tants de l’Eglise catholique ». Des patrouilles adap­tées seront organ­isées par les préfets de chaque département.

Lire aus­si : Qua­tre raisons pour lesquelles il est impos­si­ble de pro­téger toutes les églis­es de France.

Le “couac” de communication du gouvernement

« La men­ace n’a jamais été aus­si impor­tante, nous n’avons jamais eu à faire face à ce type de ter­ror­isme dans notre his­toire. » Pour étay­er sa démon­stra­tion au micro de France Inter, Manuel Valls a avancé jeu­di un chiffre erroné en affir­mant que « cinq atten­tats » avaient été déjoués depuis jan­vi­er 2015.

Une erreur que l’en­tourage du Pre­mier min­istre a rec­ti­fiée dans la foulée. Manuel Valls repre­nait en fait une déc­la­ra­tion de Bernard Cazeneuve, qui dévoilait que cinq atten­tats avaient été déjoués… depuis août 2013.

Le min­istre de l’In­térieur a égale­ment don­né quelques chiffres sur l’implication française dans des fil­ières ter­ror­istes : 630 cas de rad­i­cal­i­sa­tion « jugés sérieux » seraient actuelle­ment sous la sur­veil­lance des « ser­vices spé­cial­isés ».

Crédit pho­to : Mic, FlickR-CC BY 2.0