Justice

Ce qu’il faut savoir avant le procès Dieudonné : pourquoi l’humoriste risque gros

L’agenda judiciaire de l’humoriste est plutôt chargé ces temps-ci, mais cette fois Dieudonné encourt jusqu'à sept ans de prison pour avoir déclaré "Je me sens Charlie Coulibaly", juste après les attentats. Il comparaît ce mercredi dans une chambre spécialisée dans les affaires terroristes.

1. Pourquoi est-il poursuivi cette fois ?

Dieudon­né est pour­suivi pour “apolo­gie du ter­ror­isme”, un délit pas­si­ble de 5 ans de prison et 75 000 € d’amende ou, comme c’est le cas pour l’humoriste, 7 ans de prison et 100 000 € d’amende si le délit a été com­mis sur un ser­vice de com­mu­ni­ca­tion au pub­lic en ligne.

Dimanche 11 jan­vi­er, au soir des man­i­fes­ta­tions mon­stres pour la défense de la lib­erté d’expression, Dieudon­né a pub­lié ce mes­sage sur sa page Facebook :

Capture d'écran
Cap­ture d’écran

2. Qu’est ce que l’apologie du terrorisme ?

Depuis la loi du 14 novem­bre 2014, l’apologie du ter­ror­isme ne relève plus du délit de presse clas­sique (inscrit dans la loi de 1881 sur la lib­erté de la presse), mais a été inséré dans le code pénal.

Désor­mais, le prévenu peut donc être jugé en com­paru­tion immé­di­ate. Ce qui sig­ni­fie qu’il peut être placé sous man­dat de dépôt et incar­céré directe­ment après le procès s’il est jugé coupable.

Dans l’ar­ti­cle 421–2‑5 du code pénal nou­velle­ment créé, l’apologie du ter­ror­isme est donc définie comme ceci :

“Le fait de provo­quer directe­ment à des actes de ter­ror­isme ou de faire publique­ment l’apolo­gie de ces actes”

En com­plé­ment de cette nou­velle loi, dite de “lutte con­tre le ter­ror­isme”, la Garde des Sceaux Chris­tiane Taubi­ra a adressé aux par­quets des con­signes de “fer­meté” via une cir­cu­laire leur deman­dant de pour­suiv­re “avec la plus grande vigueur” les “pro­pos ou agisse­ments répréhen­si­bles, haineux ou méprisants”, et requiert une “grande réac­tiv­ité” de la part des parquets.

Cir­cu­laire Taubira

La vague de con­damna­tions pour apolo­gie du ter­ror­isme, dont cer­taines font polémique, illus­tre cette sévérité ambiante.

3. Apologie du terrorisme ou simple provocation ?

Dieudon­né sera jugé par la cham­bre 16–2 du tri­bunal de grande instance de Paris, spé­cial­isée dans les dél­its de ter­ror­isme, à la place de l’habituelle 17e cham­bre, spé­cial­isée dans les dél­its de presse, et à laque­lle l’humoriste est habitué.

Un démé­nage­ment sym­bol­ique, décidé à la hâte par le prési­dent du tri­bunal, au grand dam des syn­di­cats de mag­is­trats, qui y voient un signe de jus­tice d’exception.

Par ailleurs, Dieudon­né est aus­si con­cerné par une enquête pour “apolo­gie de ter­ror­isme”, suite à la pub­li­ca­tion d’une vidéo inti­t­ulée “Feu Foley” où l’hu­moriste moque l’exé­cu­tion du jour­nal­iste améri­cain James Foley par le groupe Etat islamique. À ce jour, cette enquête n’a pas débouché sur une mise en examen.

4. Comment Dieudonné va-t-il se défendre ?

Dieudon­né a déjà pub­lié un mes­sage sur sa page Face­book pour expli­quer son “Je suis Char­lie Coulibaly”, arguant qu’on le “con­sid­ère comme un Ame­dy Coulibaly, alors que je ne suis pas dif­férent de Char­lie”.

Capture d'écran
Cap­ture d’écran

 Sur le plan judi­ci­aire, l’avocat de Dieudon­né est assuré que son client s’en sor­ti­ra indemne.

“La relaxe est assurée.” — maître San­jay Mirabeau

La relaxe, c’est en tout cas ce que plaidera maître Mirabeau. Une stratégie qu’il a déjà répétée ce mar­di, lors d’un procès opposant Dieudon­né à Manuel Valls, le pre­mier ayant qual­i­fié le sec­ond de “Mus­soli­ni moitié tri­somique”.

Pho­to d’en-tête : Dieudon­né au Palais de jus­tice de Paris le 28 jan­vi­er 2015. (AFP Pho­to / S. De Sakutin)

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