Culture

Troisième numéro de Charlie Hebdo : après l’émotion, une baisse de la diffusion

Presque deux mois après les attentats qui ont décimé sa rédaction, Charlie Hebdo paraît pour la troisième fois. 1,56 million d'exemplaires seront mis en vente, un tirage en baisse par rapport aux précédents numéros.

Peut-être en avez-vous aperçu la Une en pas­sant devant un kiosque à jour­naux ce mer­cre­di matin. Le nou­v­el exem­plaire de Char­lie Heb­do, le troisième depuis la fusil­lade du 7 jan­vi­er, est de sortie.

A “l’hon­neur” cette semaine, le Front nation­al. Sur un fond bleu ciel, on peut y voir deux skin­heads ailés, armés d’une lyre… et d’un gour­din. Au titre “Le FN ne fait plus peur”, l’un d’eux répond : “Dédi­a­bolisé à fond”.

Une baisse des tirages

Cette semaine, le nou­veau Char­lie Heb­do sera tiré à 1,56 mil­lion d’ex­em­plaires. Cela peut sem­bler peu par rap­port aux 8 mil­lions ven­dus de “Tout est par­don­né”, le pre­mier depuis les attentats.

Ce tirage est même en baisse com­paré à celui de la semaine dernière. “C’est repar­ti” s’é­tait en effet écoulé, plus lente­ment cette fois, à 2,5 mil­lions d’exemplaires.

Si les ventes de Char­lie Heb­do enta­ment une légère baisse, rap­pelons, à titre d’ex­em­ple, qu’a­vant les atten­tats, l’heb­do­madaire pla­fon­nait à 24 000 tirages par semaine.

Sauver la liberté d’expression

Nathan Dar­mon fait par­tie de ceux qui ne l’achè­tent déjà plus. S’il s’est rué dans les kiosques lors de la sor­tie de “Tout est par­don­né”, il ne s’est pas procuré l’édi­tion de la semaine dernière et ne compte pas le faire avec celle d’aujourd’hui.

“J’ai acheté le Char­lie Heb­do des sur­vivants pour aider les jour­nal­istes à se remet­tre de l’at­ten­tat”, explique cet étu­di­ant en sci­ences poli­tiques, “je ne voulais pas que l’heb­do­madaire dis­paraisse à cause de ça”.

S’il estime que Char­lie Heb­do a sa place dans la presse française, Nathan Dar­mon ne s’en cache tout de même pas : il n’en est pas un grand fan.

S’abonner pour “ne pas oublier”

On ne peut pas plaire à tout le monde, soit. Mais il arrive que cer­tains changent d’avis. Char­lie Heb­do n’é­tait pas non plus la tasse de thé de Paul Ormières. Petit, il garde un sou­venir flou de la col­lec­tion de Hara-Kiri de son oncle, qu’il lisait sans com­pren­dre. Voilà tout.

Ce jeune homme n’a pour­tant pas hésité un instant à acheter “Tout est par­don­né”, pas plus qu’à souscrire un abon­nement d’un an à Char­lie Heb­do.

“L’ac­tu­al­ité va si vite, une infor­ma­tion en rem­place une autre”, explique-t-il, encore forte­ment mar­qué par les évène­ments du mois de jan­vi­er. S’abon­ner, un an — sûre­ment plus — pour “ne pas oubli­er”. “Ni de l’a­cheter, ni ce qu’il s’est passé”, pré­cise-t-il.

Au Figaro, mais pas à Minute

Un abon­nement qu’il ne regret­terait pour rien au monde. Sans se sen­tir coupable de n’avoir pas eu con­science de l’im­por­tance de l’heb­do­madaire avant les atten­tats, Paul Ormières s’est abon­né pour dire : “Les gars, main­tenant je suis avec vous, je ne vous ferai plus faux bond”.

S’il “aime pro­fondé­ment ce que fait Char­lie Heb­do”, le jeune homme admet avoir égale­ment souscrit un abon­nement pour “pro­téger, encour­ager, et soutenir la lib­erté d’ex­pres­sion”.

“Si de pareils atten­tats s’é­taient pro­duits au Figaro, je me serais sans doute abon­né aus­si”, explique-t-il. “A Minute, peut-être pas… J’au­rais acheté le pre­mier sans doute, mais pas les suiv­ants !”, recon­naît-il dans un sourire.

Pho­to d’en-tête : Le 3e numéro de Char­lie Heb­do après le 7 jan­vi­er (3millions7 / Flo­ri­an Maussion).