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Riche comme un jihadiste : Comment le groupe Etat islamique fait de l’argent, en 5 gifs

En cinq gifs décalés et cinq infos, 3 millions 7 a fait le tour des circuits de financement du groupe EI.

Le groupe Etat islamique (EI) est con­sid­éré comme l’organisation ter­ror­iste la plus riche. Depuis bien­tôt deux ans et sa mon­tée en puis­sance en Irak et en Syrie, l’or­gan­i­sa­tion use de nom­breux strat­a­gèmes afin, par exem­ple, de pay­er un salaire men­su­el de 300 dol­lars aux combattants.

Voici les cinq prin­ci­pales tech­niques du groupe EI pour rem­plir ses caisses.

1. Trafiquer des organes ?

Un jihadiste avec une arme, c’est plutôt dan­gereux. Don­nez-lui un scalpel, il se trans­forme en un fou san­guinaire. Un peu comme dans Doc­teur Maboul, mais en beau­coup moins drôle.

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Rien n’est sûr, mais la déc­la­ra­tion a fait du bruit : le groupe État islamique est accusé de reven­dre les organes des com­bat­tants enne­mis tués. C’est Mohamed Alhakim, l’ambassadeur d’Irak à l’ONU, qui le dit dans L’Obs.

“Nous avons des corps. Venez et exam­inez les. Il est clair qu’il manque cer­taines parties.”

Le diplo­mate racon­te égale­ment que des médecins irakiens ont été “exé­cutés” à Mossoul, après avoir refusé de prélever des organes.

L’Obs rap­porte par ailleurs les paroles d’un com­bat­tant de l’EI, qui dément tout traf­ic d’organes :

“Les gens sont tués d’une balle dans la tête, décapités, leurs corps jetés dans le désert, d’autres lais­sés sur le champ de bataille, voire aban­don­nés dans des puits pro­fonds. Nous n’avons déjà pas le temps de nous arrêter pour recueil­lir les corps de nos pro­pres com­bat­tants. Alors, com­ment pour­rions-nous ramass­er les corps de ceux que nous tuons et les trans­porter afin de ven­dre leurs organes ?”

2. Avoir des amis riches

Les jihadistes com­bat­tent le cap­i­tal­isme débridé à la Wall Street. Mais, pour le groupe État islamique, l’ar­gent n’a pas d’odeur, même quand il vient de ses “enne­mis” déclarés.

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À ses débuts, le groupe État islamique a vraisem­blable­ment béné­fi­cié du sou­tien financier de monar­chies pétrolières, notam­ment le Qatar et l’Arabie Saoudite.

Dans La Croix, l’ancien offici­er de la Direc­tion générale de la sécu­rité extérieure (DGSE), Alain Chou­et, est formel :

“Il est clair que l’Arabie saou­dite puis le Qatar l’ont financé.”

Un autre ancien de la DGSE, Alain Rodi­er, complète :

“Ces deux États finançaient l’ensemble des forces anti-Assad. Et cela a béné­fi­cié, entre autres, à l’EI.”

En revanche, le mon­tant de ces finance­ments est dur à éval­uer, selon ces experts, car ils “pas­saient la plu­part du temps par des dona­tions privées, des ONG islamiques ou sur le bud­get des ser­vices spé­ci­aux. […] Le tout via des mon­tages financiers com­plex­es util­isant les comptes ­off­shore saou­di­ens au Bahreïn ou au Soudan.”

Ce finance­ment “s’est arrêté à l’été 2013, pré­cise Alain Chou­et, au quo­ti­di­en libanais L’Orient-Le-Jour. Au Qatar, le change­ment s’est opéré avec l’ab­di­ca­tion de l’an­cien émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khal­i­fa al-Thani, qui a cédé le pou­voir à son fils, le prince héri­ti­er Tamim.”

En Ara­bie saou­dite, c’est le départ du chef des ser­vices de ren­seigne­ments saou­di­ens, le prince Ban­dar ben Sul­tan, en avril 2014, qui aurait mis fin aux finance­ments, selon les experts.

3. Revendre de la “marchandise” chère : les otages et les vierges

Quand Borat tente de kid­nap­per la très inno­cente Pamela Ander­son dans l’e­spoir d’en faire sa femme, c’est plutôt drôle. Mais quand ce sont les jihadistes qui s’y met­tent, ça prend tout de suite un tour­nant beau­coup plus tragique.

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L’arme médi­a­tique de l’EI est aus­si une arme finan­cière. Selon l’ex-sous-secrétaire améri­cain au Tré­sor chargé du ter­ror­isme, David Cohen, “au moins 20 mil­lions de dol­lars” de rançons sont liés aux pris­es d’otages de l’EI en 2014.

Par­mi ces 20 mil­lions de dol­lars (ou plus), 18 mil­lions seraient à met­tre au compte de la libéra­tion des qua­tre otages français, en avril 2014, selon l’hebdomadaire alle­mand Focus. Le gou­verne­ment français a, comme à son habi­tude, démenti.

Même le Pre­mier min­istre bri­tan­nique David Cameron a affir­mé, devant son Par­lement, que des “dizaines de mil­lions de livres” ster­ling de rançon arrivaient dans les caiss­es de l’EI.

Mais le groupe EI s’adonne à des kid­nap­ping moins médi­atisés et bien plus mas­sifs : celui des femmes. Selon un rap­port du Minor­i­ty Rights Group Inter­na­tion­al and the Cease­fire Cen­tre for Civil­ian Rights, une ONG inter­na­tionale con­sultée par l’ONU, 10 000 femmes ont été ven­dues par le groupe ter­ror­iste, dont au moins 3 000 rien qu’en 2014 et en Irak. Les tar­ifs : 200 à 500 dol­lars la nuit avec une vierge, et jusqu’à 20 000 dol­lars pour repar­tir avec une femme réduit en esclavage.

4. Racketter les Irakiens

Robin des Bois volait aux rich­es pour don­ner aux pau­vres. Les jihadistes de l’É­tat islamique font, eux, tout le contraire.

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Une fois un ter­ri­toire con­trôlé, le groupe État islamique s’applique à prélever dif­férents impôts et à effectuer toutes sortes d’extorsions sur la pop­u­la­tion et les insti­tu­tions. Quelques exemples :

- Un com­merçant de Mossoul a affir­mé au Jerusalem Post avoir été con­traint de pay­er 100 dol­lars par mois pen­dant six à sept mois, sous peine de voir sa famille kidnappée.

- À Mossoul tou­jours, l’EI a pris le con­trôle de trois ban­ques, dont les avoirs cumulés ont pu être éval­ués à plus de 700 mil­lions de dol­lars avant l’offensive, par une source du min­istère de la Défense irakien citée par Libéra­tion.

- De nom­breux pil­lages ont eu lieu dans les ter­ri­toires occupés: art, passe­ports, télé­phones mobiles, cig­a­rettes, CD piratés. L’universitaire et direc­trice du Cen­tre sur le ter­ror­isme, le crime transna­tion­al et la cor­rup­tion, Louise Shel­ley, dresse une liste détail­lé dans cette inter­view au Spiegel (en anglais).

- Le groupe EI a exigé des familles chré­ti­ennes un impôt de 250 dol­lars par per­son­ne, pour rester sur le ter­ri­toire con­trôlé par le groupe ter­ror­iste, rap­porte Libéra­tion.

5. Voler le pétrole

La fron­tière irako-syri­enne, c’est le berceau de l’hu­man­ité. De quoi ren­dre nos­tal­gique ces jihadistes pas­sion­nés d’His­toire. Et puis, ça tombe bien… C’est aus­si là qu’il y a les plus grandes réserves de pét­role de la région. Ça mérite bien une petite danse.

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Selon les experts, le pét­role est la source prin­ci­pale des revenus du groupe EI. Le cab­i­net améri­cain IHS a même indiqué le chiffre de 2 mil­lions de dol­lars par jour, soit env­i­ron 800 mil­lions de dol­lars par an. David Cohen, l’ancien sous-secré­taire d’Etat améri­cain, éval­u­ait ces revenus à “seule­ment” 1 mil­lion d’euros par jour.

La dizaine de champs pétro­lifères sai­sis dans l’est de la Syrie et dans le nord de l’Irak assure au groupe EI une capac­ité de pro­duc­tion de 350 000 bar­ils par jour, même s’il n’en extrait que 50 000 à 60 000 quo­ti­di­en­nement. Où vont ces bar­ils ? Sur le marché noir, où ils sont ven­dus entre 25 et 60 dol­lars, un prix bien moin­dre que celui du marché.

Mais comme toute entre­prise qui ne veut pas con­naître la crise, le groupe EI diver­si­fie ses activ­ités. Objec­tif : les céréales, qui poussent en masse dans la région nord-est d’Alep. Dans L’Orient-Le-Jour, l’expert des mou­ve­ments islamistes Romain Cail­let estime que cette nou­velle activ­ité devrait rap­porter près de 200 mil­lions de dol­lars par an. Le blé, c’est pour­tant pas ce qui leur manquait.

Pho­to d’en-tête : Wiki­me­dia Commons