« Dans ma ville, il y a 64,6 % des enfants qui sont musulmans dans les écoles maternelles et primaires », a expliqué Robert Ménard, le maire Rassemblement bleu Marine, de Béziers (Hérault). L’ancien président de Reporters sans Frontières (RSF) a tenu ces propos lundi 4 mai, dans l’émission « Mots croisés », sur France 2. Le sujet du fichage des enfants avait déjà été évoqué par le maire de Béziers. Le 19 mars 2015, il était invité au CFJ et expliquait à l’assemblée qu’à partir des prénoms des enfants, il en déduisait leur appartenance religieuse. Robert Ménard a enfoncé le clou mardi 5 mai au micro de Jean-Jacques Bourdin sur BFM TV en invitant le journaliste à « venir voir les sorties d’école à Béziers ». Un fichage approximatif et surtout illégal.
Un fichage illégal
« Je sais que je n’ai pas le droit de le faire mais on le fait », a‑t-il poursuivi, lundi soir. La justice va prendre l’affaire en main et le procureur de Béziers Yvon Calvet a annoncé l’ouverture d’une enquête préliminaire.
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Les statistiques ethniques, auxquelles Robert Ménard s’est déclaré favorable, sont interdites tout comme l’usage des listes d’élèves aux mairies à des fins de fichage site. La loi du 6 janvier 1978, stipule qu’ il « est interdit de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les options philosophiques, politiques ou religieuses… ». De nombreux téléspectateurs, associations et responsables politiques ont réagi dans la soirée à ces propos.
La ministre de la Justice, Christiane Taubira, a fustigé dans un tweet publié mardi 5 mai “l’esprit de 1939” et “les balafres faites à la République”.
L’esprit de 1939 est de retour, les mêmes vieux démons et ces balafres faites à la République. La même lâcheté sur des enfants. #Béziers
ChT— Christiane Taubira (@ChTaubira) May 5, 2015
Pour le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, Robert Ménard “a franchi une ligne jaune et se place délibérément en dehors des valeurs de la République” en ayant recours au “fichage” des élèves musulmans sur la base de leur nom. “Un tel fichage est interdit par la loi. Ficher des enfants selon leur religion, c’est renvoyer aux heures les plus sombres de notre histoire”, a affirmé l’ancien député-maire de Cherbourg (Manche).
Un fichage invérifiable
« Les prénoms disent les confessions. Dire l’inverse, c’est nier une évidence », a insisté Robert Ménard. Un prénom renvoie à une confession pour le maire de Béziers. La religion est vue comme héréditaire. Un enfant prénommé Mohammed est-il obligatoirement musulman ? Quid des Sarah ou Myriam ? Elles pourront être classées comme juives, musulmanes ou chrétiennes. La culture et la religion sont assimilées, ce qui conduit à des erreurs et à une stigmatisation de la population. Le fait d’attribuer une confession à chaque enfant revient aussi à nier la non-appartenance religieuse.
Mesures polémiques du maire Ménard
Le fichage s’ajoute aux antécédents de Robert Ménard. Les arrêtés polémiques après son accession à la mairie de Béziers se sont multipliés. Dans la ville, il est interdit d’étendre son linge aux fenêtres ou de battre ses tapis, de sortir entre 23 heures et 6 heures pour les mineurs de moins de 13 ans. En juin 2014, l’ex-président de RSF a aussi pris la décision de supprimer l’accueil à l’école des enfants de chômeurs.
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