Politique

Départementales : ce qui n’a pas été dit sur le résultat du premier tour

Les débats ont duré jusqu'à plus de minuit ce dimanche soir pour commenter les résultats du premier tour des départementales. Tout a beaucoup tourné autour du score du FN. Mais les 25% du parti d'extrême droite ne sont pas les seules conclusions à tirer de cette élection.

Des résultats encourageants pour François Hollande

À pre­mière vue, l’af­fir­ma­tion paraît absurde. Avec près de 21% des voix pour le Par­ti social­iste, le prési­dent de la République a subi une sévère défaite lors de ce pre­mier tour des élec­tions municipales.

Mais à y regarder de plus près la gauche de la gauche, qui tape sans dis­con­tin­uer sur la poli­tique économique du gou­verne­ment depuis 2012, n’en prof­ite pas. Au con­traire même, les résul­tats sont déce­vants. Alors que le Front de Gauche stagne à 6,5%, Europe-Ecolo­gie-les-Verts tombe à 2%.

Ces résul­tats mon­trent le manque d’al­ter­na­tive à gauche. Depuis 2012, Jean-Luc Mélen­chon et le Front de Gauche n’ar­rivent pas à cap­i­talis­er sur l’im­pop­u­lar­ité du cou­ple exé­cu­tif. Du côté des Verts, ces élec­tions munic­i­pales étaient les pre­mières après leur sor­tie volon­taire du sec­onde gou­verne­ment Valls en août 2014. Et c’est un échec avec ce résul­tat de 2% obtenu.

Ces résul­tats sont une bonne nou­velle pour François Hol­lande, en vue de l’élec­tion prési­den­tielle de 2017. Avec une France désor­mais divisée en trois, il peut aisé­ment attis­er la crainte d’un Front nation­al au sec­ond tour pour ten­ter de ramen­er au bercail social­iste les déçus de la poli­tique gouvernementale.

Alors qu’un remaniement min­istériel est envis­agé à la suite de ces élec­tions, ces résul­tats peu­vent aider le chef de l’É­tat à attir­er dans le gou­verne­ment des écol­o­gistes Vall­so-com­pat­i­ble, tels que le séna­teur Jean-Vin­cent Placé ou le député François de Rugy. Et ain­si élargir sa majorité en pen­sant à 2017.

Une can­di­da­ture unique PS-EELV au pre­mier tour des prési­den­tielles ne serait alors plus illu­soire. Assem­blé, le bloc de gauche, représente près de 36% des voix dans ces élec­tions départe­men­tales. Une belle marge face à un FN, dépourvu d’al­liance, à 25%.

La droite se divise sur le sujet FN

Par­tis rassem­blés dans ces élec­tions départe­men­tales, l’UMP et l’U­DI ont prof­ité de cette union pour vir­er en tête au pre­mier tour avec 30% des voix. Mais l’u­nion a vite volé en éclats dimanche soir au sujet de la posi­tion à tenir face au Front nation­al. Dès la procla­ma­tion des résul­tats, le prési­dent de l’UMP Nico­las Sarkozy a tenu la même posi­tion que depuis 2011, à savoir ni Par­ti social­iste, ni Front national.

Le prési­dent de l’U­DI, Jean-Christophe Lagarde s’est vite démar­qué de cette ligne. Sur iTélé, le député de la Seine-Saint-Denis a appelé à “faire bar­rage à l’ex­trême droite” au sec­ond tour. “Nous sommes, comme Jacques Chirac en son temps, très très clairs : il reste sur la table un bul­letin répub­li­cain et nous appelons donc à faire bar­rage à l’ex­trême droite en util­isant ce bul­letin répub­li­cain”, a‑t-il poursuivi. 

Une posi­tion qui tranche avec celle de Nico­las Sarkozy. Même à l’in­térieur de l’UMP, la posi­tion du ni-ni est encore très cri­tiquée. A la tombée des résul­tats, Alain Jup­pé, can­di­dat à la prési­den­tielle 2017, a lui aus­si appelé à bar­rer la route du FN dimanche prochain.

 

Une abstention à un niveau quasi historique

Il y avait comme une sorte de soulage­ment ce dimanche soir sur les plateaux télés. Avec 51,2% de par­tic­i­pa­tion, les Français se sont déplacés pour aller vot­er. Alors qu’on s’at­tendait, à cause notam­ment des sondages (voir plus bas), à un niveau d’ab­sten­tion record, les poli­tiques se sont félic­ités de cette mobil­i­sa­tion de dernière minute. 

Mais à y regarder de plus près cette cuvée 2015 des départe­men­tales est une des pires années en terme d’ab­sten­tion. Si les élec­tions de 2011 gar­dent tou­jours le record avec un chiffre 55,7%, celles de 2015 arrivent en sec­onde posi­tion, sur ces vingt dernières années.

Les instituts de sondages se sont bien plantés

C’est l’une des leçons à retenir de ce pre­mier tour des élec­tions départe­men­tales : il paraît bien com­pliqué de prévoir les résul­tats d’un scrutin local.

Les dif­férents sondages pub­liés ces dernières semaines ont suré­val­ué le niveau d’ab­sten­tion des électeurs français. Ain­si le 5 mars, une étude CSA/BFM plaçait l’ab­sten­tion à 58%. Le lende­main un sondage OpinionWay/Metronews/LCI, pro­je­tait un taux d’ab­sten­tion de 56%. Et enfin le 14 mars, l’analyse Ifop/Sud Ouest éval­u­ait l’ab­sten­tion aux départe­men­tales à 57%. Une enquête Odoxa/Le Parisien/ iTélé, dif­fuseé ce ven­dre­di, fai­sait égale­ment crain­dre le pire.

Dans ce sondage, 86% des per­son­nes inter­rogées jugeaient que la cam­pagne n’a pas été “à la hau­teur” de leurs attentes, et 69% esti­maient avoir été mal ou pas du tout infor­més sur ce scrutin. Mais avec une absten­tion de “seule­ment” 48,9%, les Français ont démen­ti les dif­férents insti­tuts de sondages.

Les dif­férentes enquêtes dif­fusées avant le pre­mier tour des élec­tions munic­i­pales se sont égale­ment trompées sur le score du Front nation­al. Habituelle­ment sous-estimé, le pour­cent­age obtenu par le FN a été cette fois ci suré­val­ué par les sondagiers.

Il y a trois semaines, un sondage Odoxa plaçait le Front nation­al “très large­ment en tête” avec 33% des voix. Quelques jours avant le scrutin, c’est l’I­FOP qui plaçait le par­ti d’ex­trême droite en tête avec 30% des voix. Finale­ment, ce dimanche, le FN n’a obtenu “que” 25%, der­rière l’UMP et l’UDI.

Légende de la pho­to d’en-tête : Les Français se sont déplacés plus nom­breux que prévu dans les isoloirs (Pas­cal Pochard-Cas­bian­ca / AFP)