Sécurité

Police, armée, préfets, ministères : le guide pour comprendre Vigipirate

À la fin du Con­seil de défense du mer­cre­di 11 mars, le prési­dent François Hol­lande a assuré main­tenir “l’en­gage­ment (…) de 10 000 mil­i­taires en sou­tien des forces de sécu­rité du min­istère de l’in­térieur”.

Ces 10 000 mil­i­taires vien­nent s’a­jouter aux forces de la police déjà investies dans le cadre du plan Vigipi­rate. Le min­istre de la Défense, Jean-Yves Le Dri­an, a assuré que l’ar­mée serait mobil­isée au moins jusqu’à l’été.

Entre mil­i­taires, policiers, préfets et min­istères, le plan Vigipi­rate, tou­jours au niveau “alerte atten­tats”, est com­plexe à met­tre en place. Voici un guide pour s’y retrouver :

1. Qui est concerné ?

La répar­ti­tion des forces est mise en œuvre par les acteurs éta­tiques (admin­is­tra­tions, ser­vices décon­cen­trés), les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, les respon­s­ables d’organisations, les ser­vices de sûreté et de sécu­rité. Le min­istère de la Défense explique :

“Con­for­mé­ment aux instruc­tions don­nées par le Pre­mier min­istre, chaque min­istère agit. Le min­istère de l’intérieur joue un rôle prépondérant sur le ter­ri­toire nation­al par l’intermédiaire des préfets, de la police nationale, de la gen­darmerie nationale, de la sécu­rité civile.”

2. Qui identifie les lieux à protéger ?

La police a iden­ti­fié les lieux dits “sen­si­bles” depuis les atten­tats de jan­vi­er à Paris, par exem­ple 604 sites con­fes­sion­nels. Jérôme Bonet, chef du ser­vice d’in­for­ma­tion et com­mu­ni­ca­tion la Direc­tion générale de la Police nationale, explique :

“Chaque préfet a con­nais­sance des lieux sen­si­bles de son périmètre, il fait remon­ter ses besoins et fait notre diag­nos­tic, validé ou non par le min­istère de l’Intérieur.”

Un préfet, Patrice Latron, a par ailleurs été nom­mé le 13 jan­vi­er, pour coor­don­ner la pro­tec­tion des “lieux à car­ac­tère religieux”, sur tout le territoire.

3. Qui protège en priorité les lieux sensibles ?

D’après Jérôme Bonet, il y a trois niveaux de pro­tec­tion selon les risques encou­rus : le pre­mier niveau, c’est la ges­tion de la sécu­rité civile par le com­mis­sari­at, avec des ron­des de patrouilles assurées par les policiers.

S’il y a des besoins sup­plé­men­taires en terme de sécu­rité, le min­istère de l’in­térieur a recours à “la garde sta­tique” : des hommes sont mobil­isés pour demeur­er en per­ma­nence devant des édi­fices choisis.

Cela exige des effec­tifs, et donc un besoin de CRS (com­pag­nies répub­li­caines de sécu­rité, appar­ti­en­nent à la Police nationale et inter­vi­en­nent sur ordre ver­bal du min­istre de l’In­térieur) et de gen­darmes mobiles (mil­i­taires spé­cial­isés dans le main­tien de l’ordre).

La gen­darmerie, en tant que force mil­i­taire, n’in­ter­vient que sur réqui­si­tion écrite. Cette procé­dure est à l’im­age du car­ac­tère excep­tion­nel que représente dans un pays en paix la par­tic­i­pa­tion d’une force mil­i­taire au main­tien de l’ordre.

C’est la sit­u­a­tion dans laque­lle le gou­verne­ment se trou­ve aujour­d’hui, obligé de puis­er dans les forces armées pour assur­er la sécu­rité du pays. “Leur rôle est sup­plétif, on est à flux ten­du, la mobil­i­sa­tion est énorme” assure Jérôme Bonet.

4. Quelle différence entre police et armée ?

Lors du plan Vigipi­rate, la police, les CRS, les gen­darme mobiles : tous exer­cent une mis­sion civile de sécu­rité publique, tous sont inter­change­ables, tous dis­posent des mêmes droits et de la même force.

Selon Jérôme Bonet, la police dis­poserait d’assez d’ef­fec­tifs pour répon­dre aux besoins du plan Vigipi­rate sans avoir besoin de recourir aux mil­i­taires. Mais les ren­forts mil­i­taires per­me­t­tent de “décharg­er” la police, et ain­si de lui per­me­t­tre de con­tin­uer à exercer sa mis­sion de sécu­rité civile (par exem­ple la sécu­rité routière) :

“Dans le plan Vigipi­rate, les forces armées exer­cent une mis­sion civile. On n’est pas en guerre ni en opéra­tion. Les mil­i­taires se retrou­vent avec un cadre juridique qui est le même que celui des policiers. Parce que leur mis­sion ponctuelle est une mis­sion de sécu­rité civile.”

Seul le nom­bre de per­son­nes déployées sur les lieux sen­si­bles est à la mesure des risques encou­rus. Peu importe qu’il s’agisse d’un polici­er ou d’un mil­i­taire assure Jérôme Bonet. Pour lui, cepen­dant, un mil­i­taire, “visuelle­ment, c’est quelque chose de plus impor­tant, cela envoie un mes­sage, c’est la force de dissuasion”.

Cette seule force de dis­sua­sion a per­mis d’en­reg­istr­er une baisse de la délin­quance, explique M. Bonet, même si, “par­fois ça en excite cer­tains, c’est cer­tain.” Mais pour ce qui est de la répar­tion de ces forces, c’est seule­ment une ques­tion de mathématiques :

“Entre un CRS et un mil­i­taire il n’y a pas de dif­férence. J’ai tant de sites à pro­téger, j’ai tant de troupes, je vais voir avec chaque chef de ces unités com­ment je vais les répartir.”

Pho­to d’en-tête : Garde devant le musée du Lou­vre à Paris, Cre­ative commons