Les rédactions des télés et radios ont vivement protesté vendredi contre les critiques du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sur leur couverture des attentats de Paris. Le CSA avait adressé jeudi soir 36 avertissements à seize médias pour avoir, pendant leurs directs sur les prises d’otages de janvier, révélé des informations sensibles, susceptibles selon lui de menacer la vie des otages. Le conseil a également évoqué des amendes ou autres sanctions en cas de récidive.
“Le CSA s’arroge le droit de faire évoluer ses missions et de se transformer en censeur des ondes”, dénonce le Syndicat national des journalistes (SNJ), qui s’inquiète d’un “bâillon aux rédactions”. Le CSA pousse à “l’autocensure” des médias, ajoute le syndicat. “Dans aucun pays démocratique confronté à des situations similaires, une instance d’État n’est allée aussi loin dans la volonté de s’ériger en guide tutélaire.” Le SNJ veut “se pourvoir devant la juridiction compétente” et appelle à la création d’une “véritable instance nationale de déontologie, associant des représentants des journalistes, des éditeurs et du public”.
Pour Jean-Marc Four, directeur de la rédaction de France Inter, le CSA n’est ni légitime ni pertinent en “maître d’école” qui distribue des “mauvais points”. “Le CSA impute aux médias la responsabilité de déterminer quand une situation de ‘sauvegarde de l’ordre public’ l’emporte sur le devoir d’informer. Or, nous n’avions reçu aucune consigne des pouvoirs publics sur des informations qu’il conviendrait de ne pas livrer”, a‑t-il commenté sur l’antenne de France Inter.
“En distribuant des mauvais points aux médias audiovisuels, il laisse le champ libre à la jungle des réseaux sociaux. Surtout, il pose en réalité un jugement moral sur ce devraient publier ou pas les journalistes. Au nom de quelle légitimité ce jugement est-il porté?”
Même indignation de la Société des rédacteurs d’Europe 1, qui proteste contre une “sanction injuste”. La Société des journalistes de TF1 a dit avoir découvert “avec colère” les mises en demeure du CSA.
“Le ton du CSA (…) est déplacé compte tenu, comme il le reconnaît lui-même, ‘des difficultés propres à la couverture d’une telle actualité’.”