Justice

Un village des Vosges se mobilise après un acte islamophobe

Agression raciste sur une famille sans histoire, dans un village sans histoire. Il y a près d’un mois, une famille de confession musulmane a été victime d’un incendie criminel. Un événement qui a suscité l'indignation de la mairie et des habitants.

La façade de la mai­son est noir­cie, les tags de croix gam­mées à peine effacés. Un incendie crim­inel a eu lieu con­tre une famille de con­fes­sion musul­mane à Thié­fos­se, une petite ville de mon­tagne dans les Vos­ges, qui a tenu à soutenir publiquement .

L’agression s’est déroulée dans la nuit du 3 au 4 avril. “Cela fait presque un mois et per­son­ne n’a encore été inter­pel­lé”, regrette Adil Selouane, le père de la famille visé par l’in­cendie. On ne veut pas que cet acte reste impuni”.

Un voisin a vu leur pre­mière voiture s’enflammer et a alerté Iham Selouane, la mère. Elle a sor­ti ses qua­tre enfants, âgés de 20 mois à huit ans, et ne s’est ren­due compte qu’une fois dehors que des croix gam­mées avaient été inscrites sur leur mur. Leur deux­ième voiture était alors en feu de l’autre côté de la maison.

Adil Selouane est à la fois en colère et dégoûté. Ce père de qua­tre enfants était à l’hôpital quand l’incendie s’est pro­duit. “Je sor­tais d’une opéra­tion de l’épaule, je n’ai pas dor­mi pen­dant dix jours et je ne suis tou­jours pas sere­in”, con­fie cet homme. Depuis un mois il se répète : “Si jamais le feu avait pris sur la ter­rasse en bois, je n’aurais plus d’enfants, je n’aurais plus de femme”. Il n’a pas peur, mais reste désor­mais sur ses gardes “si les agresseurs revi­en­nent”. 

Il se dit per­tur­bé, choqué, dégoûté. Il évoque alors le trau­ma­tisme de ses enfants.

“Mon fils de huit ans me dit : mais on est musul­man, on est nor­mal, pourquoi ils nous ont attaqué”, explique le père de famille. La famille Selouane se dit cos­mopo­lite. “J’ai des cousins alsa­ciens, pré­cise-t-il avant de s’indigner, nous ne sommes pas ren­fer­més sur nous !”. Il éprou­ve des dif­fi­cultés à expli­quer cet acte raciste à son fils aîné.

La femme d’Adil, Iham, recon­naît s’être fait insul­ter de “sale arabe” quelques semaines avant l’incendie. Le maire Stanis­las Hum­bert s’étonne tou­jours de cet acte qu’il qual­i­fie de crim­inel. Thié­fos­se et ses 600 habi­tants n’avaient jusque-là jamais con­nu d’actes xéno­phobes. “Il y a pour­tant des familles tunisi­ennes, por­tu­gais­es… Elles ont tou­jours été tranquilles”.

Stanis­las Hum­bert a tenu à soutenir la famille. Avec le con­seil com­mu­nal, il a voté une motion de sou­tien et offert aux enfants des vélos pour rem­plac­er ceux détru­its pen­dant l’incendie. “C’est une famille sans his­toire, dans un vil­lage sans histoire”.

Ce maire se bat con­tre l’image des petits vil­lages de cam­pagne reclus sur eux-mêmes. Stanis­las Hum­bert répète son admi­ra­tion pour les sol­dats maro­cains qui ont libéré son vil­lage à la fin de la deux­ième guerre mondiale.

La stèle n’a pas été décriée, mais applau­di par les habi­tants. Adid, Iham et leurs enfants sont eux tou­jours très tour­men­tés. Quant aux con­séquences matérielles, la pre­mière voiture ser­vait au père à aller au tra­vail, la deux­ième à aller en vacances. La famille Selouane restera à Thié­fos­se cet été.