50%
des personnes victimes d’agression ces dernières semaines étaient entrés en Afrique du Sud de façon illégale, selon le Haut commissariat des nations unies pour les réfugiés.
Si le pays s’est libéré de l’apartheid il y a 24 ans, il n’en a pas pour autant terminé avec la xénophobie.
Zwelethu Jolobe, professeur de science politique à l’université de Cape Town, dresse un constat implacable, dans La Croix :
“Le gouvernement n’ose même pas utiliser le mot xénophobie parce qu’ils ne veulent pas écorner l’image internationale de la nation arc-en-ciel. Mais il ne s’agit pas de simple criminalité. La société sud-africaine est xénophobe et il faut accepter la réalité en face.”
Plus de 350
étrangers ont été tués depuis 2008, selon le Centre des migrations africaines de l’université de Witwatersrand à Johannesburg.
Ce mythe de l’immigré voleur d’emploi prend également racine dans le flou des statistiques. Le nombre d’étrangers oscille entre 2 et 5 millions, soit 4 à 10% des 53 millions de Sud-Africains. Parmi eux, entre 500 000 et 1 million de sans-papiers. En janvier dernier, on recensait 69 500 réfugiés et 295 000 demandeurs d’asile, selon l’UNHCR, l’Agence des nations unies pour les réfugiés.
Les étrangers originaires de l’Afrique australe, de la Somalie et de l’Ethiopie sont à la fois les premières victimes et les premiers à tenter de rejoindre le pays. Ces non-nationaux sont suspectés de profiter indûment des investissements ou des services que ces derniers ont si longtemps attendus.
Il y a moins d’un an, le gouvernement a choisi de durcir drastiquement ses lois migratoires. Depuis le 26 mai 2014, il est impossible de passer par un intermédiaire pour faire sa demande de visa, chacun doit se rendre en personne dans l’ambassade d’Afrique du Sud de son pays d’origine pour déposer son dossier.
Autre conséquence de la nouvelle loi : une personne ayant dépassé son temps de séjour en Afrique du sud pourra être bannie du pays pour une durée de 2 à 5 ans. Enfin, pour créer une entreprise dans le pays, il faudra désormais employer au minimum 60% de Sud-Africains.
Une question plus sociale que raciale
Plus que raciale, la problématique semble désormais profondément sociale, comme l’explique le géographe Philippe Gervais-Lambony, dans Libération :
“Le président sud-africain lui-même reconnaît que l’Afrique du Sud est toujours divisée entre deux nations : non plus les Noirs et les Blancs, mais ceux qui sont dans le système et ceux qui en sont exclus. D’autant que l’Afrique du Sud, loin de créer des emplois, en perd depuis 1994.”
Les immigrés, qui représentent 3 à 9% de la population, seraient, pour un grand nombre, responsables du chômage de masse. Un Sud-Africain sur quatre est aujourd’hui sans emploi. La statistique monte à plus de la moitié chez les jeunes.
Si la part de la population vivant dans l’extrême pauvreté a légèrement reculé pour s’établir à 17%, les inégalités s’intensifient depuis 1991.