Un doublement du nombre de conflits sur la laïcité en un an ? C’est le chiffre issu d’une étude publiée par Le Parisien mardi 21 avril et repris un peu partout dans les médias.
L’étude, à manier avec précaution, fait ressortir d’autres conclusions. Parmi elles, le chiffre de 56% de personnes qui disaient, en 2014, n’être « jamais ou moins d’une fois par an confrontées à la religion dans leur travail ».
Un an plus tard, 49% des dirigeants n’ont jamais ou rarement eu à intervenir dans des situations ayant une dimension religieuse. C’est encore la part la plus importante des réponses.
Par ailleurs, et sans doute est-ce là plus important, moins de 6% du total des cas aboutissent à un conflit ou débouchent sur une sanction. Un chiffre, certes en augmentation depuis l’an dernier (+3 points), mais qui reste relativement faible.
Quant à la pratique religieuse au travail, elle ne « dérange pas » 92% des personnes interrogées.
Pour Lionel Honoré, président de l’Observatoire du fait religieux en entreprise (OFRE), interrogé par Le Parisien, « les cas les plus conflictuels se concentrent dans quelques entreprises : les transports, la logistique, le bâtiment, le maraîchage et dans les banlieues ».
L’an dernier, l’étude réalisée par l’OFRE montrait que 25% des conflits en entreprises étaient religieux et que 75% d’entre eux « n’avaient aucune conséquence sur l’ambiance ou la production de l’entreprise ».
Un biais de méthode
La méthodologie de l’étude pose d’ailleurs problème, et en particulier le profil des personnes interrogées. 93% des personnes interrogées occupent une fonction d’encadrement dans l’entreprise dont 30% dans la gestion des ressources humaines.
La faible proportion de salariés parmi l’échantillon représentatif ne donne qu’une vision verticale, celle du dirigeant sur ses employés. Les personnes interrogées sont presque exclusivement des cadres confrontés au quotidien aux demandes et aux conflits des employés.
L’enquête aurait sans doute été plus équilibrée en intégrant des employés qui vivent leur religion au quotidien dans l’entreprise dans l’échantillon représentatif.
Enfin, le document rendu public par Randstad répartit les personnes interrogées en fonction de leurs religions respectives : 55% d’entre eux se déclarent catholiques et 22% athées. Cette forte homogénéité dans le profil religieux des personnes interrogées tend sans doute à grossir la part des situations de conflit comme la demande d’absence pour fête religieuse et le port ostentatoire d’un signe, les situations de conflit les plus fréquentes rencontrées par les dirigeants.
¹: Enquête de l’analyse Sociovision de la société française 2014–2015, menée auprès de 2099 personnes, âgées de 15 à 74 ans interrogées en face-à-face, dont 1018 catholique et 122 musulmans auto-déclarés (méthode des quotas).