Sécurité

“Si des terroristes arrivent pour nous attaquer, ils ne s’arrêteront pas à une matraque”

Matthias* est gendarme mobile. Durant plusieurs semaines, il est affecté avec son escadron à la surveillance d'une grande institution à Paris.

“Les journées sont telle­ment longues qu’il n’est pas pos­si­ble d’être vig­i­lant tout le temps. Je reste jusqu’à deux heures devant les portes. Après on tourne : les relèves sont fréquentes. Ça atténue la longueur des journées, qui sont d’une dizaine d’heures en moyenne. 

Tu n’as pas de con­signes par­ti­c­ulières quand tu gardes la porte parce que t’es pas un garde répub­li­cain non plus. Il faut juste avoir une pos­ture “mil­i­taire” : être debout, sans télé­phone, ne pas fumer… On peut dis­cuter. C’est pour ça que lorsqu’on est deux le temps passe vite. Comme quand les gens vien­nent deman­der des renseignements.

Mais si des ter­ror­istes sont prêts à tout pour nous atta­quer, ils ne s’arrêteront pas à une matraque ou un gilet pare-balles. Si quelqu’un arrive et tire, on est vul­nérables : il y aura un temps de réac­tion en cas d’attaque. Per­son­ne ne fait vrai­ment le gué de toute façon. Notre mis­sion est de fil­tr­er les entrées, pas de riposter à une attaque. Il ne faut pas croire qu’on est postés prêts à tir­er s’il se passe quelque chose. C’est ce qui fait qu’on oublie la men­ace et qu’on ne pour­ra pas anticiper. Notre présence est surtout dissuasive.

L’essentiel de l’action, c’est d’assurer la vis­i­bil­ité devant l’entrée. Il y a une liste de voitures autorisées, les autres ne peu­vent même pas sta­tion­ner devant les portes. Si des groupes se for­ment, il faut aller les voir pour savoir ce qu’ils font et les dis­pers­er. Le plus sou­vent, ce sont des gens à qui on donne des ren­seigne­ments. Cer­tains sont énervés par notre présence. Avec Vigipi­rate il n’y a plus de passe-droits, les fouilles sont les mêmes pour tout le monde.

Lorsqu’on est à l’extérieur, le port d’un gilet pare-balles appar­ent est oblig­a­toire avec le plan Vigipi­rate au niveau alerte atten­tat : lui seul per­met de con­tr­er les balles d’armes de guerre. Moi, j’en mets un autre sous mon uni­forme. Comme ça je suis cou­vert juridique­ment s’il m’arrive un truc. Les gens deman­dent pourquoi, ça les inter­pelle. Je pense que c’est une autre fonc­tion du gilet pare-balles appar­ent : ça per­met au pub­lic de voir que la vig­i­lance est plus élevée que d’habitude. Mais le gilet pèse entre 8 et 13 kg. C’est lourd, ça appuie sur le cein­tur­on et ça fait mal au dos au aux pieds lorsqu’on reste debout longtemps.”

* L’i­den­tité a été changée pour préserv­er l’anonymat.