Bouter les jihadistes hors d’Irak. Telle est l’ambition de l’armée irakienne, qui mobilise depuis onze jours près de 30 000 hommes dans la plus vaste offensive jamais lancée contre les positions du groupe État islamique dans le pays. Après avoir encerclé la périphérie, ils ont réussi à faire une incursion dans Tikrit, une ville pétrolière du nord du pays qui est aux mains des jihadistes depuis 9 mois.
Une bataille stratégique
Tikrit est un point stratégique, « un tremplin sur le chemin de la libération de Mossoul (au nord ndlr)», selon le commandant militaire de la province de Tikrit, cité par l’AFP.
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Aidée dans sa lutte contre le groupe EI par des combattants kurdes et des miliciens chiites, soutenue par l’Iran et les raids aériens de la coalition internationale (menée par les Etats-Unis), l’armée irakienne a remporté quelques victoires.
Le maire d’Al Alam, une localité située à 5 kilomètres au nord de Tikrit, cité par Reuters, se réjouit des avancées des forces régulières :
“Je vous parle en ce moment d’Al-Alam et j’annonce officiellement que la ville est sous le contrôle total des forces de sécurité, des unités Hachid Chaabi (Mobilisation populaire, milices chiites) et des combattants tribaux”.
D’autres villes de la périphérie de Tikrit ont été reprises par l’armée, comme Al Dour et Al Bouajil. Mais sa progression est ralentie par de nombreux obstacles.
Un parcours semé de mines et de voitures piégées
Sur le site des Observateurs de France 24, le journaliste irakien Ali Mahmoud, qui accompagné les forces de sécurité irakiennes lors de la prise de la ville d’Albouajil affirme que celles-ci “veulent libérer toutes les localités alentour avant de lancer l’assaut sur Tikrit.” Selon lui, si les forces de sécurité avancent lentement et prudemment, car les combattants du groupe EI ont “non seulement posé des mines, mais également placé des explosifs dans des véhicules et piégé des installations électriques”.
Des milices chiites éprises de vengeance
L’autre risque qui menace la progression (et la légitimité) de l’armée irakienne vient de ses propres alliés. Lundi dernier, alors que le village d’Al-Bouajil venait d’être repris, les milices chiites qui intervenaient aux côtés de l’armée régulière ont incendié des dizaines de maisons et de commerces. Un acte de vengeance contre ses habitants sunnites, accusés d’être impliqués dans le massacre de centaines de soldats chiites en juin 2014, par les membres du groupe EI.
Dans les pages du quotidien britannique The Guardian, l’analyste Hassan Hassan affirme que quelque soit l’issue de la prise de Tikrit, les jihadistes de l’EI ne pourront être vaincus en Irak que par des sunnites.
Pour l’auteur du best seller “L’État islamique : au coeur de l’armée de la terreur” il ne suffit pas de reprendre Tikrit :
“L’État islamique sortira gagnant de l’offensive de Tikrit, même s’il perd militairement, tant que les vainqueurs seront des miliciens sectaires qui se conduisent de la même manière que les jihadistes”.
Photo d’en-tête : Un char de l’armée irakienne — Ahmad al-Rubaye / AFP