Les aumôniers musulmans sont aujourd’hui présentés comme des remparts à la radicalisation qui s’opère en détention. Mohamed Zaïdouni est l’un d’entre-eux. Il travaille au centre pénitentiaire de Rennes-Vézin le Coquet et préside le conseil régional du culte musulman de Bretagne.
Mohamed Zaïdouni était auditionné ce jeudi, à l’Assemblée nationale, par la commission d’enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes, créée en septembre.
Interrogé sur sa capacité à approcher les personnes les plus radicalisées, l’aumônier présente sa démarche “en deux temps”. Première étape : “gagner la confiance des détenus”.
“Il faut répondre à leurs attentes. On est à la merci de la bonne volonté des individus, qui souhaitent nous rencontrer ou non. Lors des repas à l’occasion des fêtes religieuses, on arrive à entrer en contact et on peut alors leur expliquer que notre démarche est purement théologique, basée sur l’écoute et le réconfort.”
C’est alors que s’instaure le dialogue :
“On parle d’abord du quotidien, de quelques questions théologiques, puis on essaye de les interpeller sur ce qu’il se passe autour d’eux. On est dans l’apaisement et la discussion. Je n’ai pas de formule magique. Une des clés c’est la vraie connaissance de la religion, le rappel du fait que la finalité d’une religion c’est la paix et l’amour.”
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Interpellé par Eric Ciotti, président (UMP) de la commission d’enquête, sur la responsabilité, voir la “lâcheté” éventuelle, des instances représentatives du culte musulman face à la montée de la radicalisation, Mohamed Zaïdouni renvoie cordialement la balle :
“Pour pouvoir demander des comptes, il faut d’abord donner des moyens.”
Et de souligner que : “Le statut des imams et des aumôniers est précaire, souvent bénévoles, certains sont parfois uniquement rémunérés par le seul défraiement de leurs actes. Être aumôniers par exemple n’ouvre pas de droit à la retraite. Il faut des moyens pour assurer pleinement cette mission.”
Manuel Valls annonçait le 21 janvier que le budget de l’aumônerie musulmane allait être doublé et que 60 nouveaux postes d’aumôniers musulmans seraient créés pour compléter le travail des 182 déjà en activité. Pour Mohamed Zaïdouni, “il y a une carence numérique mais aussi en terme de statut : le bénévolat n’est pas un cadre efficace pour fournir un travail sérieux de longue haleine.”
La loi de 1905, qui régit la laïcité en France, impose à l’administration de permettre aux personnes retenues dans un établissement géré par l’État de pratiquer leur culte. C’est pourquoi elle impose la présence d’aumôniers de différentes confessions dans les lieux de détention mais aussi dans les hôpitaux, les internats et l’armée.
Photo d’en-tête : prison abandonnée de Loos, près de Lille — Rémi (Flickr)