Justice

Attentat de la rue des Rosiers : identifier les suspects c’est bien, sauf qu’on ne peut pas tous les extrader

Trois hommes suspectés d'être impliqués dans l'attentat de la rue des Rosiers ont été identifiés hier par la justice française. Un grand pas dans l'enquête, sauf que leur extradition sera très difficile, voire impossible.

La nou­velle était partout hier, mer­cre­di 4 mars : les sus­pects de l’at­ten­tat anti­sémite qui a touché Paris en août 1982 ont été identifiés.

La Ligue inter­na­tionale con­tre le racisme et l’an­tisémitisme (Licra) s’est réjouie de ce “mes­sage fort lancé à tous les ter­ror­istes”, tout comme la Fédéra­tion nationale des vic­times d’at­ten­tats et d’ac­ci­dents col­lec­tifs, qui a salué la “déter­mi­na­tion de la jus­tice”, dans les colonnes de La Dépêche.

Tout cela est très bien, et le tra­vail du juge antiter­ror­iste Marc Trevedic a été colos­sal. Main­tenant, il faut extrad­er les trois sus­pects, c’est à dire que les États où ils rési­dent les livrent à la jus­tice française afin qu’ils soient jugés en France. Et ce n’est pas tou­jours possible.

Palestinien d’origine, mais citoyen norvégien

Walid Abdul­rah­man Abou Zayed, dit “Souhail Oth­man” est un des deux hommes soupçon­nés d’avoir fait par­tie du com­man­do qui a tué six per­son­nes et fait 22 blessés. Il a 56 ans et ne se con­tente pas de vivre en Norvège, comme les pre­mières infor­ma­tions l’ont indiqué, il est Norvégien.

Et c’est là que le bât blesse. La loi norvégi­en­ne explique que “toute per­son­ne inculpée ou con­damnée pour un délit pas­si­ble de sanc­tions dans un autre pays et se trou­vant en Norvège peut être extradée vers le pays en ques­tion, si le délit en ques­tion est pas­si­ble, au regard du droit norvégien, d’une peine d’emprisonnement supérieure à un an”, sauf s’il s’ag­it d’un ressor­tis­sant norvégien.

La solu­tion pour con­tourn­er ce prob­lème pour­rait être que Souhail Oth­man soit déchu de sa nationalité.

Sauf que les délais de pre­scrip­tion pour les “actes de ter­ror­isme graves” ont longtemps été de 25 ans en Norvège. En 2013, une loi a sup­primé toute pre­scrip­tion pour ce type de faits… sans effet rétroac­t­if. Les actes dont Souhail Oth­man est soupçon­né, qui datent de 32 ans, tombent sous le coup des anciens délais de pre­scrip­tion. Avec ou sans nation­al­ité norvégi­en­ne, il est donc très peu prob­a­ble qu’il soit inquiété par la jus­tice française.

Un accord avec la Jordanie adopté aujourd’hui

Zouhair Mouhamad Has­san Khalid al-Abassi est Pales­tinien et vit en Jor­danie. Il serait le “cerveau” des attentats.

Hier encore, il aurait été impos­si­ble de l’ex­trad­er. Mais les députés français ont adop­té aujour­d’hui, jeu­di 5 mars, le pro­jet de loi déposé en 2012 qui autorise les extra­di­tions entre la France et le roy­aume jordanien.

En revanche, rien ne con­traint la Cisjor­danie à livr­er Mah­moud Khad­er Abed Adra, lui aus­si soupçon­né d’avoir par­ticipé à l’at­ten­tat. Il est Pales­tinien et vit à Ramal­lah. Il ne sera sûre­ment pas inquiété de si tôt.

Pho­to d’en-tête: Le restau­rant cacher Jo Gold­en­berg le jour de l’at­ten­tat (AFP / J. Demarthon)