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La drôle de stratégie de la Jordanie contre le groupe Etat islamique

Exécutions de prisonniers, bombardements, libération d'un prêcheur jihadiste, la Jordanie multiplie les stratégies pour contrer le groupe Etat islamique.

L’é­mo­tion est encore vive en Jor­danie, une semaine après la reven­di­ca­tion par le groupe État islamique de l’exé­cu­tion du pilote Maaz al-Kas­saes­beh. Ce matin, des mil­liers de per­son­nes sont descen­dues dans les rues de la cap­i­tale pour pro­test­er con­tre le groupe ter­ror­iste. Même la reine Rania était par­mi les manifestants.

 

Si la pop­u­la­tion réag­it vive­ment à l’as­sas­si­nat, les autorités ne sont pas en reste. Dès l’an­nonce du crime, le porte parole de l’ar­mée a déclaré que la “vengeance sera[it] pro­por­tion­nelle à cette cat­a­stro­phe qui a frap­pé l’ensem­ble des Jor­daniens”. Dans la foulée, le gou­verne­ment a annon­cé qu’il allait exé­cuter Saji­da Al-Riwashi, la ter­ror­iste iraki­enne que le groupe Etat islamique récla­mait en échange du pilote. Un autre pris­on­nier égale­ment accusé de ter­ror­isme a été pendu.

Après ces pre­mières repré­sailles, le gou­verne­ment a ensuite décidé de bom­barder les posi­tions du groupe ter­ror­iste en Syrie.

Dans cette vidéo de l’in­ter­ven­tion, on voit deux pilotes écrire à la craie sur les bombes qu’ils vont larguer. Le pre­mier note que “L’is­lam n’a rien à voir avec l’É­tat islamique” et le sec­ond inscrit une cita­tion du Coran, indi­quant que les “ter­ror­istes brûleront en enfer”.

Après la violence, une stratégie de manipulation risquée

Dernière mesure en date prise par la Jor­danie, la libéra­tion aujour­d’hui du prédi­ca­teur jihadiste Abou Mohamed al-Maq­das­si, en prison depuis octo­bre 2014 pour “prop­a­ga­tion sur inter­net des idées d’un groupe ter­ror­iste, le Front al-Nos­ra”. À peine remis en lib­erté, l’homme a été invité à s’ex­primer sur la chaîne de télévi­sion jor­dani­enne, Roy­al News, dans une émis­sion spé­ciale en hom­mage au pilote. Il a martelé que le cal­i­fat du groupe État islamique n’é­tait “pas légitime”. L’idée en libérant cet homme proche d’Al-Qaï­da est de décrédi­bilis­er le groupe État islamique. Pour Was­sim Nasr, jour­nal­iste à France 24, “il est con­nu pour être un vir­u­lent opposant à l’or­gan­i­sa­tion de l’É­tat islamique. L’in­térêt d’Am­man est que Maqdessi décrédi­bilise, avec des argu­ments religieux, l’EI et la sen­tence infligée au pilote, à savoir l’im­mo­la­tion par le feu”. Une stratégie risquée puisqu’elle revient à favoris­er un groupe ter­ror­iste pour en affaib­lir un autre.

Pho­to d’en-tête: Les avions de l’ar­mée jor­dani­enne prêts à frap­per le groupe État islamique en Syrie (Cap­ture d’écran vidéo de l’ar­mée jordanienne).