Education

“Depuis les attentats, de plus en plus de journalistes veulent intervenir dans les écoles”

Les assises du journalisme se tenaient ce vendredi  à Paris. Cette édition était dominée par le souvenir des attentats. 3millions7 a rencontré Isabelle Martin, coordinatrice académique auprès de Centre de Liaison de l'Enseignement des Médias et de l'Information (CLEMI).

3millions7.com : Quelles sont les missions du CLEMI ?

Isabelle Mar­tin : Le CLEMI est le Cen­tre de Liai­son de l’En­seigne­ment des Médias et de l’In­for­ma­tion (médias tra­di­tion­nels et inter­net). Il a été créé en 1983 pour impulser dans des actions, de la mater­nelle au lycée, qui met­tent en lien les mon­des du jour­nal­isme et de l’é­d­u­ca­tion. Par exem­ple, à Bor­deaux, nous menons un parte­nar­i­at depuis 10 ans entre des étu­di­ants du sec­ondaire et France 3 Aquitaine. Ils doivent réalis­er un reportage d’une minute une fois par mois pour le jour­nal télévisé.

3m7 : Vous voulez généraliser l’éducation aux médias dans les écoles. Qu’est-ce que ça veut dire ? Que vous manque-t-il aujourd’hui ?

I.M : Un rap­port est tombé récem­ment avec un con­stat ter­ri­ble : en gros, ça dis­ait que les valeurs de la République étaient expliquées mais hors-sol. Nous avons beau­coup d’e­spoir avec les textes qui vien­nent de sor­tir, notam­ment sur ce par­cours citoyen que porte le gou­verne­ment. Il vise à ren­dre les élèves acteurs de leur citoyen­neté. Ça passe notam­ment par la pro­duc­tion de con­tenus, de médias.

On compte aus­si beau­coup sur les pro­grammes. Ce qui va être déter­mi­nant, c’est de voir si cette logique va être inscrite dans les pro­grammes finale­ment. Aujour­d’hui, l’é­d­u­ca­tion aux médias c’est à la carte. Or il faut qu’elle soit trans­ver­sale, que le prof d’anglais par exem­ple, ne puisse plus dire : “Moi, je ne suis pas con­cerné !”

3m7 : Vous parlez des enseignants mais que dire de la défiance générale à l’égard du journalisme ?

I.M : Ceux qui sont méfi­ants vis-à-vis des médias sont générale­ment ceux qui ne les con­nais­sent pas et n’ont pas tou­jours la méthodolo­gie pour décrypter l’ac­tu­al­ité. Il ne faut pas nier les erreurs par­fois com­mis­es par les jour­nal­istes. Mais les expli­quer, c’est le dis­cours que nous tenons au CLEMI. Prenez l’an­nonce erronée de la mort de Mar­tin Bouygues par l’AFP il y a quelques jours. Pour en par­ler, nous abor­dons les con­traintes économiques, la con­cur­rence, l’ur­gence qui pèsent sur les rédac­tions. L’en­jeu de notre démarche n’est pas seule­ment de favoris­er des parte­nar­i­ats édu­ca­tion-médias pour que les jeunes réalisent des con­tenus c’est aus­si per­me­t­tre de com­pren­dre les médias dans leur glob­al­ité. Il faut aus­si par­ler des dif­fi­cultés des jour­nal­istes, dont la dimen­sion économique, les prob­lèmes éventuels que peu­vent présen­ter la rela­tion avec les annon­ceurs etc.

3m7 : Nous sommes aux assises du journalisme et des suggestions ont été faites pour développer l’éducation aux médias. Quelles propositions concrètes ont retenu votre attention ?

I.M : L’idée de met­tre en place une plate­forme pour coor­don­ner jour­nal­istes et per­son­nels édu­cat­ifs. Depuis les atten­tats, nous recevons beau­coup de mails de jour­nal­istes qui cherchent à inter­venir dans les écoles, à être mis en rela­tion avec elles. Après il existe une autre propo­si­tion intéres­sante, émise par le gou­verne­ment, qui est de créer un média par col­lège. Là, j’at­tends d’en savoir plus. Aura-t-on les bud­gets néces­saires pour financer les inter­ven­tions des gens des médias ? Voilà une ques­tion dont on attend la réponse.

Pho­to de cou­ver­ture : Isabelle Mar­tin aux assis­es du journalisme.