La liberté de la presse a reculé partout dans le monde. Un constat indéniable pointé du doigt par le classement mondial de Reporters sans frontière (RSF), publié jeudi. Pourtant, la France gagne une place en 2014. Un résultat encourageant mais qui sonne faux après l’attentat contre le siège de Charlie Hebdo, début janvier. Logiquement, la France sera jugée encore plus sévèrement en 2016 puisque la mort de journalistes est un critère primordial ainsi que les réactions disproportionnées de la justice qui a condamné plusieurs individus à des peines de prison ferme pour leurs propos tenus sur les réseaux sociaux.
Avec sa 38e place sur 180 pays, la France reste à mille lieues de ses voisins nordiques. Pour la cinquième année consécutive, la Finlande conserve la tête du classement, suivie cette année par la Norvège et le Danemark. Christophe Deloire, secrétaire général de RSF, expliquait sur France info, la position de l’Europe :
“De manière générale, l’Europe demeure le continent sur lequel la liberté de la presse est la plus grande même s’il y a une érosion du modèle européen, et un décrochage de certains pays.”
La France dans le viseur de RSF
Dans leur rapport, Reporters sans frontière précise que la France “connaît un niveau élevé de conflits d’intérêts”. Et son carnet de note n’est pas brillant. Avec 21,15 points, l’Hexagone a gagné 74 dixièmes de points par rapport à l’an dernier. Or, dans ce système*, plus on gagne de points, moins la liberté de la presse est respectée. C’est donc grâce “à la détérioration globale” et de l’ensemble des pays que la France a progressé d’un rang.
Parmi les reproches fait au pays des droits de l’homme, trois sont mis en lumière par l’ONG :
- Le projet de loi sur le secret des sources qui semble enterré et l’absence de protection des sources des blogueurs.
- La loi de programmation militaire (LPM) votée en 2013 puisque l’article 20 permet les mises sur écoute administrative.
- L’adoption de la loi anti-terroriste en novembre 2014. Les délits de provocation aux actes de terrorisme et d’apologie du terrorisme sont désormais sortis de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
“Une régression brutale”
Les actions du groupe État islamique ainsi que celles de Boko Haram, au Nigéria, sont responsables de la “régression brutale” de la liberté de la presse, selon RSF.
“De Boko Haram au groupe Etat islamique, en passant par les narcotrafiquants latinos ou la mafia sicilienne, les motivations varient mais le modus operandi est le même : réduire au silence, par la peur ou les représailles.”
La Syrie, pays jugé le plus dangereux pour les journalistes, stagne à la 177ème place tandis que l’Italie chute de 24 places, au 73ème rang. Au contraire, la Mongolie a progressé de 34 places et devient le 54ème pays, notamment grâce à la mise en place de véritables médias de service public.
* Le classement repose sur sept indicateurs : niveau des exactions, étendue du pluralisme, indépendance des médias, environnement et autocensure ici, cadre légal, transparence et infrastructures.
Photo d’en-tête : La liberté de la presse a régressé dans le monde selon le classement annuel de RSF (Capt. écran Reporter sans frontière)