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Un demi-million de migrants traverseront la Méditerranée en 2015

Entassés au milieu des bidons d’essence, dans des can­ots longs de qua­torze mètres, ils sont 220 à avoir débar­qué jeu­di dans le port de Catane, en Sicile. C’est un patrouilleur de la Guardia di Finan­za (police des finances) qui a sec­ou­ru ces clan­des­tins, à quar­ante kilo­mètres au large des côtes libyennes.

Quelques jours après le naufrage d’un cha­lu­ti­er qui a fait 800 morts, le flux des migrants ne faib­lit pas. Les chiffres de l’année 2015 s’annoncent ver­tig­ineux. L’Organisation mar­itime inter­na­tionale (OMI), rat­tachée à l’ONU, annonce qu’un demi-mil­lion de migrants ten­teront la tra­ver­sée de la Méditer­ranée cette année. Pour Koji Sekimizu, directeur de l’organisation, « si rien n’est fait pour lut­ter con­tre ceux qui organ­isent le trafics d’êtres humains », plus de 10 000 per­son­nes pour­raient trou­ver la mort.

30 fois plus de morts que l’an dernier

Dans le même temps, le min­istère ital­ien des Affaires étrangères annonce que 5 000 migrants pour­raient débar­quer sur les côtes ital­i­ennes chaque semaines, d’ici le mois de sep­tem­bre. Une déc­la­ra­tion qui cor­ro­bore les pro­pos du directeur de l’OMI puisque si ces chiffres se véri­fient, cela portera le nom­bre de nou­veaux venus à 200 000 rien qu’en Ital­ie. Le pays pour­rait d’ailleurs se retrou­ver sub­mergé par un afflux impos­si­ble à maîtris­er. Actuelle­ment, 81 000 per­son­nes dont 13 000 mineurs sont accueil­lis par l’I­tal­ie, selon Mario Mor­cone, préfet chargé de l’immigration.

Mais ces chiffres sont d’autant plus inquié­tant lorsqu’ils sont mis en par­al­lèle avec ceux de l’année 2014. L’an dernier, 170 000 migrants ont tra­ver­sé la Méditer­ranée pour rejoin­dre l’Europe et 3 000 d’entre eux ont péri. Rien que sur le pre­mier trimestre de 2015, 1 750 migrants sont morts en mer, alors qu’ils n’étaient que 56 l’an dernier à la même péri­ode, d’après l’OIM. Fin 2014, Rome annonçait déjà ne plus pou­voir sup­port­er le coût des opérations.

Nous ne devri­ons pas seule­ment nous préoc­cu­per des opéra­tions de recherch­es et de sec­ours, mais aus­si lut­ter con­tre les passeurs, les trafi­quants en couliss­es — Koji Sekimizu, prési­dent de l’OIM.

Un devoir « moral »

« Il est temps de réfléchir vrai­ment à la manière de stop­per le pas­sage très dan­gereux et risqué de migrants sur de petits bateaux », a déclaré Koji Sekimizu, lors d’une con­férence à Sin­gapour. « Nous ne devri­ons pas seule­ment nous préoc­cu­per des opéra­tions de recherch­es et de sec­ours, mais aus­si lut­ter con­tre les passeurs, les trafi­quants en couliss­es », a souligné le responsable.

Fed­er­i­ca Mogheri­ni, chef de la diplo­matie européenne, évo­quait la néces­sité d’une meilleure répar­ti­tion des respon­s­abil­ités pour l’accueil des migrants et des réfugiés, et par­lait de « devoir moral ». Une urgence qui se jus­ti­fie encore plus à la lumière du réc­it des 28 sur­vivants de la cat­a­stro­phe de dimanche. L’un des deux passeurs a don­né quelques détails sur la tra­ver­sée. Ceux qui avaient le moins d’argent étaient entassés à fond cale, les autres, sur le pont intermédiaire.

Les dirigeants européens se retrou­vent aujour­d’hui pour un som­met extra­or­di­naire à Brux­elles. Une opéra­tion mil­i­taire pour­rait être envis­agée con­tre les trafi­quants de migrants en Lybie. En atten­dant que l’Europe se décide, le ressac des migrants con­tin­ue de venir s’écras­er con­tre les côtes italiennes.

(Avec AFP)

Crédit pho­to : CC-BY Nobor­der Network