Culture

American Sniper, succès au box-office sous le feu des critiques

Malgré ses six nominations aux Oscars et son succès indéniable au box-office américain, le nouveau film de Clint Eastwood, American Sniper, ne fait pas l’unanimité dans les consciences. Et la polémique commence à retentir en France.

 

Le débat autour du film Amer­i­can Sniper né aux Etats-Unis s’exporte désor­mais de l’autre côté de l’Atlantique avant même la sor­tie du film*, ren­for­cé par l’ef­fet Char­lie. Le séna­teur UDI de Paris Yves Poz­zo di Bor­go a envoyé une let­tre à François Hol­lande ren­due publique dans les colonnes du Jour­nal du dimanche, le 8 février.

« Ce film met en scène, de manière extrême­ment vio­lente et réal­iste, l’exécution par un sol­dat améri­cain, pen­dant la guerre d’Irak, de 160 per­son­nes de con­fes­sion musulmane. »

Apolo­gie de la vio­lence, pro­pa­gande de l’armée améri­caine ou sim­ple réc­it d’une tranche de l’histoire ? Ces dif­férentes visions de la guerre en Irak, qui a pris fin en 2011, ressur­gis­sent aux Etats-Unis depuis la sor­tie du film Amer­i­can Sniper, réal­isé par Clint East­wood. En cause : le scé­nario qui racon­te l’histoire de Chris Kyle, meilleur tireur d’élite de la Navy. Incar­né à l’écran par Bradley Coop­er, Chris Kyle était surnom­mé « le dia­ble de Rama­di » par les insurgés irakiens en rai­son du nom­bre con­sid­érable de vic­times tuées dans cette ville.

“Tentative de reparler de la guerre en Irak ou l’histoire d’un lâche ?”

Michael Moore a rapi­de­ment dégainé con­tre celui qui se van­tait d’avoir abat­tu plus de 255 cibles durant sa car­rière. Sur Twit­ter,  le réal­isa­teur de Bowl­ing for Columbine n’a pas hésité à traiter les tireurs d’élite de « lâch­es » et à racon­ter qu’un de ses oncles avait été tué par un sniper durant la Sec­onde guerre mondiale.

Dans son édi­to, la jour­nal­iste Susan Meier du Bal­ti­more sun résume par­faite­ment la polémique et répond à Michael Moore en se deman­dant s’il s’agit d’une « ten­ta­tive de repar­ler de la guerre en Irak et la ven­dre aux Améri­cains, ou l’his­toire d’un lâche qui dégomme des femmes et des enfants en restant à l’abri ?».

Elle tranche à sa façon en admet­tant qu’elle ne regardera pas le film car elle n’est pas en mesure de con­sid­ér­er les guer­res con­tem­po­raines telles que l’Afghanistan et l’Irak comme des sujets de divertissement.

En Irak, seuls quelques chanceux ont pu voir Amer­i­can Sniper. Selon le Wash­ing­ton Post, le film a été retiré du seul ciné­ma de Bag­dad qui le pro­je­tait car le min­istère de la Cul­ture esti­mait que le film « insul­tait les Irakiens ». Le gérant du ciné­ma aurait reçu un appel d’un mem­bre du min­istère de la Cul­ture, qui l’au­rait men­acé d’une amende et de la fer­me­ture de son étab­lisse­ment en cas de refus d’obtempérer.

La classe politique divisée

Dans la classe poli­tique améri­caine, les réseaux soci­aux ser­vent de tri­bune pour don­ner son avis. Sarah Palin, anci­enne pré­ten­dante à la vice-prési­dence en 2008 et égérie du par­ti con­ser­va­teur Tea Par­ty, n’a pas mâché ses mots en qual­i­fi­ant sans ver­gogne les célébrités d’Hol­ly­wood de « gauchistes ».

«Alors que vous caressez des trophées en plas­tique qui bril­lent, que vous vous échangez en crachant sur la tombe des com­bat­tants de la lib­erté qui vous ont per­mis de le faire, sachez que le reste de l’Amérique con­sid­ère que vous n’êtes pas dignes de cir­er les bottes de com­bat de Chris Kyle », a‑t-elle écrit noir sur blanc sur sa page Face­book le 19  janvier.

Post FB de Sarah Palin à propos du film American sniper
Post FB de Sarah Palin à pro­pos du film Amer­i­can sniper

 

Même Michelle Oba­ma s’est exprimée publique­ment sur le film lors de son inter­ven­tion le 30 jan­vi­er dernier, à la Nation­al Geo­graph­ic Soci­ety. « Je sais que ce film a ses détracteurs, mais j’ai trou­vé que le film abor­dait nom­bre des émo­tions et des expéri­ences qui m’ont été racon­tées directe­ment par les familles de mil­i­taires au cours de ces dernières années », a expliqué la First Lady.

Après les pages “Cul­ture” et “Poli­tique”, Amer­i­can sniper pour­rait bien­tôt faire par­ler de lui dans les pages “Jus­tice” des jour­naux améri­cains. Le 11 févri­er, le procès d’Ed­die Ray Routh, l’an­cien sol­dat qui a assas­s­iné Chris Kyle en 2013, s’ou­vre à Stephenville, au Texas. Cer­tains mag­is­trats se deman­dent même si l’hy­per-médi­ati­sa­tion du film n’in­flu­encera pas le jury.

*Sor­tie prévue le 18 février.

Pho­to d’en-tête: Cap­ture d’écran de la bande-annonce du film.