Politique

Législative dans le Doubs : Nicolas Sarkozy manie l’art de la synthèse

Le président de l’UMP dit "non au FN" mais veut "laisser les électeurs choisir", dans le duel qui opposera le parti frontiste au PS au second tour de l’élection législative partielle du Doubs de dimanche prochain. Une synthèse qui fait suite aux divisions internes de l’UMP sur l’attitude à observer face au "front républicain".

Nico­las Sarkozy, ou l’art de la syn­thèse. Tirail­lé entre les appels au Front répub­li­cain et les ten­ants de la stratégie du “ni-ni” (con­sis­tant à appel­er les électeurs à ne vot­er ni pour le can­di­dat social­iste ni pour la can­di­date fron­tiste) le prési­dent de l’UMP a affir­mé ce mar­di une posi­tion inter­mé­di­aire pour le sec­ond tour de l’élection lég­isla­tive par­tielle du Doubs, qui opposera le PS au FN.

Dire “non au FN” mais “laiss­er les électeurs choisir” : tel est le nou­veau mantra de l’ex-chef de l’Etat. “Une vic­toire du FN au plan nation­al n’est plus hypothé­tique”, a aver­ti Nico­las Sarkozy devant les députés UMP, réu­nis à l’Assemblée nationale. Dans ce con­texte, “nous ne don­nons pas de con­signes de vote” aux électeurs du Doubs “mais nous leur deman­dons de pren­dre en compte cette dimen­sion”, a‑t-il expliqué.

L’élimination du can­di­dat UMP dès le pre­mier tour du scrutin était inat­ten­due. Elle a placé Nico­las Sarkozy devant une équa­tion impos­si­ble. Soutenir offi­cielle­ment le can­di­dat social­iste Frédéric Bar­bi­er, c’était se met­tre à dos la base de l’UMP, majori­taire­ment favor­able au ni-ni. 67% des sym­pa­thisants du par­ti sont favor­ables à cette option, selon un sondage IFOP pour LCI et Le Figaro. Cela aurait égale­ment accrédité la thèse fron­tiste d’une coali­tion « UMPS », ton­nent plusieurs ténors de l’opposition, comme Hen­ri Guaino.

L’UMP se fissure

Ren­voy­er dos à dos les final­istes de l’élection n’était pas moins risqué. Marine Le Pen n’a pas pris part à la grande marche parisi­enne du 11 jan­vi­er, préférant se retranch­er à Beau­caire, fief du FN dans le Gard. Dans un con­texte mar­qué par l’union nationale post-Char­lie, l’UMP refuse donc de met­tre sur le même plan FN et PS… et apporte un sou­tien très implicite à Frédéric Bar­bi­er, can­di­dat social­iste dans le Doubs.

Théorisé par Jean-François Copé lors des élec­tions régionales de 2011, le “ni ni” a vécu. Mais Nico­las Sarkozy a‑t-il pour autant tranché dans cette affaire ? Pas vrai­ment, au regard de la sit­u­a­tion de son parti.

La ques­tion du FN divise l’UMP. “Mes idées ne sont pas celles du Par­ti social­iste donc je n’ap­pelle pas à vot­er social­iste (…) Je ne partage pas les idées du Front nation­al donc je ne vote pas pour le FN (…) Je voterais blanc si je devais vot­er”, a déclaré Lau­rent Wauquiez, secré­taire général du par­ti. A l’inverse, la vice-prési­dente Nathalie Kosciusko-Morizet et Alain Jup­pé ont appelé à vot­er PS dans le Doubs. Invité sur le plateau du jour­nal de France 2, l’an­cien pre­mier min­istre a estimé que : “le FN est devenu le pre­mier adver­saire de l’UMP. Il n’est pas ques­tion de front répub­li­cain, on ne fait pas d’al­liance avec les socialistes.”

Depuis dimanche, les pris­es de posi­tions con­tra­dic­toires se multiplient.

Avec un Front nation­al à 5%, cette frac­ture serait anec­do­tique. A 30%, elle men­ace l’avenir de l’UMP, dans la per­spec­tive de la prochaine prési­den­tielle. Le Front nation­al est aujourd’hui un con­cur­rent direct et non plus un sim­ple cail­lou dans sa chaus­sure. Nico­las Sarkozy ne s’y trompe pas, évo­quant “un risque d’ex­plo­sion de l’UMP”.

Face à ce risque, l’ex-chef de l’Etat choisit donc… de ne pas choisir entre les ten­dances de l’UMP. Ni “ni ni”, ni front répub­li­cain. Un art de la syn­thèse qui rap­pelle celui déployé par François Hol­lande pen­dant ces années à la tête du PS.