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Service civique obligatoire : populaire mais complexe

L'idée de rendre obligatoire le service civique se répand chez les politiques de droite comme de gauche. Cependant, son élaboration et sa mise en place s'annoncent délicates.

Dans la foulée des atten­tats qui ont touché Char­lie Heb­do et le mag­a­sin Hyper Cash­er et des débor­de­ments dans les col­lèges lors de la minute de silence, les députés PS se sont mis à réfléchir à de nou­velles mesures pour ren­forcer le lien entre la jeunesse et la République. Par­mi elles, celle de mod­i­fi­er le ser­vice civique, voire de le ren­dre “oblig­a­toire”.

Cet engage­ment volon­taire, instau­ré en 2010 par Mar­tin Hirsch, alors Haut-com­mis­saire aux sol­i­dar­ités actives con­tre la pau­vreté,  per­met à tous les jeunes de 16 à 25 ans, de tra­vailler auprès d’associations, de col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales ou d’établissements publics, sur une péri­ode de 6 à 12 mois en France ou à l’étranger.

L’oblig­a­tion ou même, dans une moin­dre mesure, l’ex­ten­sion du ser­vice civique s’avèr­erait pour­tant plus com­pliqué qu’il n’y parait.

1. La question de la contrainte

Le 6 novem­bre dernier, le prési­dent de la République avait envis­agé de ren­dre le ser­vice civique oblig­a­toire, comme l’é­tait le ser­vice mil­i­taire aupar­a­vant. Dans la propo­si­tion de loi à laque­lle réfléchissent les députés, il est d’ailleurs pré­cisé qu’une amende de 15.000 euros serait infligée à ceux qui ne l’ef­fectueraient pas. Avec une telle oblig­a­tion, tant finan­cière que morale, le recours au ref­er­en­dum sem­ble alors inévitable. Une alter­na­tive que l’Élysée a démenti.
Pour­tant, l’avis des Français sur la ques­tion est loin de laiss­er indif­férent du côté de l’E­tat puisque jeu­di 29 jan­vi­er, le site gou­verne­men­tal www.service-civique.gouv.fr/ invi­tait les inter­nautes à voter :

Si les résul­tats de cet audit n’ont pas encore été com­mu­niqués, la réac­tion des inter­nautes ne s’est pas fait attendre :

Ou encore :

 

2. A quel prix ?

Cette oblig­a­tion, si elle obte­nait l’aval des Français, n’en ren­con­tr­erait pas moins cer­taines con­sid­éra­tions finan­cières. Selon François Chérèque, prési­dent de l’a­gence du ser­vice civique, il faudrait aug­menter con­sid­érable­ment le bud­get annuel alloué par l’E­tat au ser­vice civique.

De 150 mil­lions d’eu­ros investis chaque année, il faudrait pass­er à 3 mil­liards. Un tel effort sem­ble entr­er en con­tra­dic­tion avec la poli­tique finan­cière du gou­verne­ment à l’heure où celui-ci planche sur son plan d’é­conomies de 50 mil­liards d’é­conomie dans les dépens­es publiques d’i­ci à 2017. 

 

3. Un manque certain de place

Pour François Chérèque, il y a “trois ou qua­tre” fois plus de deman­des que de mis­sions disponibles. Mal­gré une prise en charge finan­cière presque totale du volon­taire par l’E­tat, nom­breuses sont les associations/institutions qui n’ont pas besoin d’aide.
Une thèse que con­fir­ment, voire empli­fient les dif­férents organ­ismes pour­voyeurs de mis­sions. Pour sa dernière demande de volon­tari­at, l’a­gence “Ping sans fron­tières” a reçu une dizaine de candidatures.
Après les atten­tats, François Hol­lande n’a pas caché son souhait que  les volon­taires soient “entre 150.000 et 170.000 par an”. Une ambi­tion louable, certes, dans un désir de réc­on­cil­i­a­tion sociale, mais qui pour le moment achoppe sur une réal­ité complexe.
Pho­to d’en-tête: François Hol­lande et les poli­tiques aux pris­es avec une mesure dif­fi­cile à appli­quer. (Lionel Bonaventure/AFP)